Eve Beuvens
Lysis
Igloo Records
Après avoir essayé à peu près toutes les formules, la pianiste et compositrice Eve Beuvens revient à la base, le trio : « Trois est un bon chiffre pour la musique, dit-elle, mais je n’avais pas envie d’une batterie. Comme je voulais un son spectral très large, j’ai opté pour l’électronique ». Pas avec elle aux manettes, non, mais grâce à la participation de ses deux acolytes, la chanteuse Lynn Cassiers et le contrebassiste Lennart Heyndels qui sont, tous deux, des “forts” en électro. Par contre, la composition, c’est son rayon, et Eve Beuvens assume tout, y compris leur dissolution, leur lyse… « Il y a beaucoup d’improvisation libre dans cet album et mes compositions, auxquelles j’ai apporté énormément de soin, ne servent souvent que de prétexte. » Certains ont même complètement disparu, se sont dissoutes, diluées, ou ont changé de forme. D’où le nom du disque en grec ancien, Lysis, avec lequel la musicienne veut « illustrer une forme de processus de transformation » et auquel font échos des titres comme Electrolyzed, Ionized ou Fire and Ice. Ce dernier est particulièrement angoissant, comme toute transformation peut l’être, mais la native de Saint-Gérard, dans l’Entre-Sambre-et-Meuse, réfute toute allégeance à l’air du temps, ou alors « de manière inconsciente, avec une forme d’ironie ». Par contre, ce qui est bien intentionnel, c’est le recourt à des poètes anciens tels que Robert Frost, Emily Dickinson, Dorothy Parker ou Edna St. Vincent Millay dont les textes courts et incisifs sont valorisés par la voix de Lynn Cassiers. Eve Beuvens dit avoir fait le tour des librairies anglophones à Bruxelles, en quête, pour Lysis, du « contraste entre la poésie du siècle passé, voire antérieure, et l’usage de l’électronique ». Une démarche originale à l’effet saisissant.