À la re-découverte de Guy Cabay
Tricatel exhume plusieurs albums
Pour le commun des mélomanes, amateurs ou chroniqueurs-journalistes, évoquer le nom de Guy Cabay soulevait généralement une certaine indifférence et un vague souvenir d'une chanson wallonne d'un autre temps.
Il fallait donc qu'un éditeur, musicien, patron de label français pointu s'y intéresse pour que l'indifférence se mue en interrogation et qu'on aille enfin y voir d'un peu plus près. L'orpailleur en question s'appelle Bertrand Burgalat, c'est lui qui est à l'origine du label Tricatel, "digger" de luxe, défricheur de nouveaux et d'anciens sons. Un homme qui a le sens du recul, celui qui nous manque parfois un peu.
Bref, on re-découvre les chansons de Guy Cabay. Burgalat a su y entendre ce qu'on n'entendait pas (plus), une langue wallonne qui rivalise avec le portugais / brésilien propre au style bossa. Car c'est bien de bossa wallonne qu'on parle et même plus précisément, liégeoise.
Voici ce qu'on retrouve sur la note de pochette qu'a écrite Bertrand Burgalat concernant les rééditions que son label Tricatel vient d'exhumer.
Cher Monsieur,
De passage en Belgique pour une émission de télévision qui n’a pas eu lieu à cause des grèves, Claude PUTERFLAM, artiste et producteur de la maison WEA FILIPACCHI, et avec qui nous sommes en accord au niveau de l’édition, a rapporté un disque 30 cm intitulé “TOT-A-FET ROTE COU-D’ZEUR COU-D’ZOS“ qu’il nous a fait écouter à son retour.
Nous sommes unanimes pour dire qu’il y a très certainement une grande originalité et un talent certain pour mettre des rythmes sud-américains sur des textes en Flamand (sic), et ce mariage crée une certaine magie qu’il faudrait exploiter plus en profondeur.
Peut-être pourriez-vous nous contacter à Paris, afin que nous nous rencontrions lors d’un de vos passages en France. peut-être trouverons-nous un accord pour travailler tous ensemble, Claude Puterflam, vous et moi.
Soyez gentil de nous donner de vos nouvelles, et de nous faire savoir quand vous comptez venir en France, mais peut-être pourriez-vous nous téléphoner.
"Ainsi écrivait Christian de Ronseray, directeur des éditions You You Music, le 6 Novembre 1978. Il a existé, dans cette industrie, des personnes qui parlaient ainsi de musique et s’attachaient à la faire aimer. Mais il existait déjà aussi quelques tristes sires qui faisaient n’importe quoi. Après avoir publié ces chansons à compte d’auteur avec la collaboration de son cousin Michel Dickensheid, qui les avait enregistrées dans son studio et commercialisées sur sa propre marque MD, Guy Cabay signa une licence avec un directeur artistique de RCA. Celui-ci ne les sortit pas, et ne rendit jamais les bandes.
Elles continuaient de charmer ceux qui avaient eu la chance de les entendre.
Au Japon, le label Vivid Sound avait publié un CD en 2012, mais il fallait toujours aller sur YouTube pour trouver quelques extraits." (Bertrand Burgalat)
L'herbe n'est pas plus verte ailleurs qu'en Wallonie et Guy Cabay mérite assurément que l'on y prête une (bonne) oreille... voire même les deux.