La révolution Tipik?
Lancée à la rentrée, la plateforme radio-télé-digitale de la RTBF souhaite séduire tous les 25-39 ans. Une opération de charme qui passe aussi par un relifting de sa programmation musicale. Larsen fait le point.
7 septembre 2020, 6 heures du mat’. C’est parti! En gestation depuis dix-huit mois à la RTBF, la plateforme Tipik prend son envol en radio (bye bye Pure), en télé (so long La Deux) et un peu partout en digital. Cible de cette nouvelle ‘marque’ ? Les ‘millenials’. Soit, dans la terminologie Reyers, les ‘jeunes adultes’ ou, pour les sociologues, la ‘génération Y’. «Tipik vise les actifs de 25-39 ans, précise Detchenma Smeesters, cheffe éditoriale de Tipik, radio & digital. En radio, Pure ciblait déjà cette audience, mais notre objectif est de la toucher encore plus largement. Nous avons revu la ligne éditoriale, mis à l’antenne de nouvelles voix, créé de nouveaux rendez-vous, mais nous restons fondamentalement une radio ‘musicale’.
À son lancement en avril 2004, Pure FM avait ouvert les ondes avec Pure morning de Placebo, tandis que Classic 21 poussait le Beautiful Day de U2 pour son baptême. Ce 7 septembre, La matinale de Djé lance la programmation musicale de Tipik avec un titre qui a également valeur de symbole: Blinding Lights de The Weeknd. Dix minutes plus tard, ce sera le Londonien Joel Corry avec le très commercial Head and Heart. Quelques jours plus tard, on tend l’oreille l’après-midi. La pétillante Lucille tente de mettre du soleil dans le cœur des auditeur·trice·s (qu’elle appelle ses ‘petits chats’) avec une playlist finalement très ‘feel good’ où on reconnaît Ariana Grande, Diplo et Dua Lipa. Plus loin, il y aura aussi Blanche et un tube 2.0 de Linkin Park, seule incartade dans ce qu’on pourrait appeler du rock indie.
« Le relifting de la programmation musicale avait déjà été amorcé sur Pure voici un an, rappelle encore Detchenma Smeesters. La playlist de Tipik s’articule autour de trois segments : les sons du moment, des découvertes et des morceaux ‘souvenirs’ puisés dans les années 90/2000. Nous sommes persuadés que c’est cette recette qui va nous permettre de toucher un public plus large. À chaque heure, il y a une représentation de ces trois catégories, même si on passe beaucoup plus de nouveautés en soirée. » Les quotas imposés (10% de chanson en français, 12% de productions de la Fédération Wallonie-Bruxelles) ne sont pas considérés comme des contraintes. « C’est dans notre ADN et il y a beaucoup de qualité en Fédération. Sans qu’il y ait des passe-droits, on mise évidemment beaucoup sur ce qui se fait chez nous. Nous poussons en avant des coups de cœur, on prend des risques, on fait des choix. Non seulement, nous sommes souvent les premiers en radio à lancer le single d’un artiste émergent, mais nous l’accompagnons aussi dans son développement. Pour le genre ‘rock’, je reconnais qu’il y en a moins qu’il y a cinq ans. Mais on en passe encore. Il ne faut pas oublier que nous sommes tributaires du marché. Si notre public consomme moins de rock, ce paramètre se reflétera sur notre programmation. »
Une telle révolution ne se transforme pas du jour au lendemain en plébiscite et se mesure encore moins après une seule vague d’audience. « Je pense qu’on a réussi notre lancement, nous disait néanmoins Detchenma Smeesters un mois après le lancement du Tipik. Nous savons d’expérience qu’il y a toujours des réfractaires au changement, mais nous sommes confiants et nous serons encore plus heureux quand Tipik pourra aller sur le terrain à la rencontre de son public. » Interrogé par L’Écho, le patron de la RTBF Jean-Paul Philippot affirme, pour sa part, ne pas envisager d’appliquer cette stratégie à d’autres publics et de fusionner d’autres marques de la RTBF, comme La Une avec La Première. « Il faut d’abord que nous digérions ce lancement et voir s’il répond à nos attentes. Après on verra. »
Après avoir délocalisé son ‘prime’ de début de soirée aux Nuits Botanique, Tipik reprendra son bâton de pèlerin sur les festivals 2021. Et pour les fans de guitares indie, il y a aussi Jam, la radio web de la RTBF lancée (trop) discrètement en 2019.