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par le Conseil de la Musique

Lambert Colson

La revanche du cornet à bouquin

Stéphane Renard

À la tête de son ensemble InAlto, Lambert Colson raconte l’épopée du cornet à bouquin aux 16e et 17e siècles. Un disque raffiné, d’une élégance toute Re- naissance, à la gloire d’un instrument aux timbres envoûtants. Plongée dans l’histoire avec Cavalieri imperiali.

Lambert Colson

Ne vous y trompez pas. Il a l’air d’une flûte courbée mais il n’est pas de la famille. Le cornet à bouquin est un cuivre, instrument à embouchure. Célèbre aux 16e et 17e siècles, le cornet ne s’offre qu’aux meilleurs tant il est exigeant. Lambert Colson est aujourd’hui l’un de ses plus brillants propagandistes et son nouveau disque, à la tête de son ensemble InAlto, en est une superbe démonstration. Cet enregistrement rend hommage aux cornettistes virtuoses Luigi Zenobi (1547-1602) et Giovanni Sansoni (1593-1648), “cavalieri imperiali” au service des Habsbourg. Conscient du risque de monotonie d’un tel récital, Colson a concocté un programme envoûtant. S’enchaînent ainsi les plus belles pages offertes ou transposées au cornet entre 1560 et 1660 par Lassus, Luzzaschi, Neri, Ruffo ou Schmelzer. Cette épopée extrêmement raffinée est d’autant plus prenante que le chef et son duettiste Josué Meléndez Pelaez se sont entourés d’une douzaine de cordes, vents et clavier pour varier les effectifs et les timbres.

 

Lambert Colson

« Le cornet à bouquin a une forte personnalité sonore,
avec une dynamique à l’image 
de la voix humaine. »
 

Ce programme reflète parfaitement le cheminement de Lambert Colson, musicien, chef, chercheur et pédagogue au parcours nourri. Flûtiste diplômé à 16 ans du conservatoire d’Aubervilliers, « cette banlieue rouge de Paris où, dit-il, la Culture crée du lien social », il connaît une jeunesse bourlingueuse. Deux ans à Rome et à Barcelone. Passage à la Sorbonne en droit et en économie – « ma crise existen- tielle de 18 ans », sourit-il. Retour à la musique, au Conservatoire de Bruxelles, et à l’Académie de Woluwe Saint-Lambert où il découvre le cornet avec Marleen Leicher. Séjour à Bâle ensuite, auprès du père de tous les cornettistes Bruce Dickey, avant deux ans encore à Brême. Toujours cette soif d’apprendre….

Une forte personnalité

Mais au fond, c’est quoi, vraiment, un cornet ? « Il s’agit, explique Lambert, d’une émanation des instruments d’appel – souvent des cornes d’animaux – connus de toutes les civilisations et utilisés lors des cérémonies de passage – rituels mortuaires, d’acceptation dans un groupe, d’accès à la majorité… » Dans sa forme actuelle – deux morceaux de bois creusés, collés et assemblés par du cuir –, le cornet ne date cependant que de la fin du 17e siècle. Son succès est considérable à la Renaissance et au 17e siècle. « Il correspond au développement de la musique vocale, souligne Lambert. Il va donc soutenir les chanteurs dans les processions, la liturgie et la musique de cour. Cela s’explique par sa forte personnalité sonore, avec une dynamique à l’image de la voix humaine, aux articulations très claires. »

Cette polyvalence ne l’empêchera cependant pas de s’éteindre, pour de multiples raisons que liste Lambert Colson. « La peste noire a tué en 1630 la moitié des Vénitiens, dont d’illustres cornettistes. Les compositeurs se seraient détournés de cet instrument faute de solistes inspirants. De plus, le cornet a toujours eu un rôle d’apparat quasi royal. Il est donc devenu moins populaire au 18e siècle avec la musique chambriste. La pratique musicale de la bourgeoisie en amateur ne l’a pas servi non plus, car c’est un instrument difficile. Enfin, son timbre si reconnaissable s’est sans doute heurté, lors de l’agrandissement progressif des orchestres, au souci d’un mélange sonore harmonieux. »

Depuis, avec la redécouverte de la musique ancienne, le cornet a pris une revanche bien légitime.

Et quel beau son que celui d’InAlto, patiemment ciselé, dont ce nouveau disque impose plus que jamais la signature sonore d’une formation née il y a dix ans à peine.


InAlto / Lambert Colson
Cavalieri imperiali

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