Iliona
L'envol
Signée sur le label parisien Artside, la Bruxelloise Iliona décline son vague à l’âme sur Tristesse, un premier EP où les fantômes de la chanson française traditionnelle s’agitent sur des sonorités urbaines. Portrait d’une artiste en plein envol.
Entre piano classique et beats glacés, refrains autotunés et arpèges de cordes, Tristesse, premier EP d’Iliona, s’impose au fil des écoutes comme l’une des plus belles offrandes reçues en chanson française depuis longtemps. Une oreille formée au classicisme épuré de Françoise Hardy et de Barbara, une autre tendue vers le monde sous-terrain des geeks, cette auteure/compositrice autodidacte en dit déjà beaucoup sur elle au travers de ces huit plages (dont deux instrumentales). « Mes compositions reflètent parfaitement ma personnalité, confirme l’intéressée. Il y a toujours eu chez moi un côté enfant modèle qui voulait suivre les règles pour rester dans la norme et, de l’autre, un esprit plus rebelle. Dans ma musique, ces deux tendances se confrontent. J’adore trouver des mélodies évidentes, voire des trucs qui ont déjà été faits. Mais j’aime aussi partir dans des arrangements plus barrés qui sont davantage dans l’énergie que dans la mélodie. Les textes me viennent facilement, souvent avec des images ou des détails qui font “la photo”. Il y a aussi beaucoup de double sens dans mon écriture. »
IlionaSur cet EP, je me suis faite confiance et on m’a fait confiance.
Comme elle le chante dans Une autre vie, Iliona Roulin – son vrai nom – a fantasmé très tôt sur son futur. « Je n’ai pas eu d’enfance malheureuse mais j’en garde finalement très peu de souvenirs. Très vite, je voulais devenir adulte. À Bruxelles, avec mes potes, nous avions l’impression d’être des outsiders par rapport à des villes comme Paris ou New York. Notre rêve, c’était d’être libres. On se promettait de ne pas rester, de ne pas faire comme nos parents. J’apprenais l’anglais sur Internet, je jouais déjà au piano, je faisais de la photo, du dessin. Je me voyais évoluer dans l’art, sans savoir encore dans quelle discipline. Après les humanités, quasi tous mes potes ont renoncé à leurs rêves d’un “ailleurs”. Ils ont choisi des études supérieures très classiques et ça m’a fait flipper. J’ai essayé Saint-Luc, puis l’histoire de l’art à l’ULB, mais j’ai tout arrêté après trois mois pour ne faire que de la musique. »
Écrite à l’adolescence, la première chanson d’Iliona était une ode à Nick Jonas, chanteur du boys band The Jonas Brothers. Un souvenir qui suscite aujourd’hui un sourire, mais pas de honte. Elle bricole ensuite quelques compositions qui finissent sur la Toile. Son côté geek la rapproche d’une autre “outsider” de Bruxelles : Ana Diaz. Elles deviennent amies et collaborent. « J’ai produit son premier EP. Travailler avec Ana, c’était comme si j’avais fait des études. J’ai appris à me concentrer sur la composition et à mettre en avant le propos de l’artiste. Avec le recul je me rends compte, que c’était une manière de mettre un pied à l’étrier sans avoir trop de pression. Cette expérience a enrichi mon propre projet. »
Distribué par Artside, structure française à taille humaine qui s’occupe aussi de Zed Yun Pavarotti, Tristesse est un EP généreux. « J’ai souvent été frustrée par des EP d’artistes que j’aime où il n’y avait que deux ou trois titres. Je voulais propo- ser quelque chose de consistant. » Sur Tristesse, elle a tout contrôlé, y compris les clips où son rapport à l’image est bluffant. Comme souvent la France s’est emballée avant nous. « On est à la mode là-bas », dit-elle sobrement. N’empêche. Julien Doré l’a invitée lors d’une émission radio sur RFM, Biolay est fan, Yelle lui a proposé d’ouvrir pour sa prochaine tournée. Iliona qui aime Paris pour son côté “fast life” ne songe pas pour autant à quitter Bruxelles. « Je vois cet EP comme le début d’une histoire et un peu comme une carte de visite. Il y a eu un vrai sentiment de liberté. Je me faisais confiance et on m’a fait confiance. Pour un album, je pense que je serai plus stressée. »
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