Remy Lebbos
Music Sounds Better with You
En attendant l’arrivée du vaccin anti-Covid, Remy Lebbos a parié de se laisser pousser les cheveux. Entre mixage, production et mastering, l’ingé-son promène également sa crinière dans les chansons du groupe Atome.
Affairé derrière l’imposante console du Rare Sound Studio, Remy Lebbos écoute la progression d’un mixage audio. Dans le même temps, il rembobine sa propre histoire. « Mon père est de Damas, maman de Lattaquié. Ils ont mis le cap sur la Belgique en 1981 pour construire une famille à l’abri des instabilités de leur pays. Parfois, les gens pensent que je suis Grec. Peut-être parce que Lebbos rime avec gyros, s’amuse-t-il. Toujours est-il que je suis d’origine syrienne. Je parle arabe, mais ma culture musicale s’est forgée à l’écart du Moyen-Orient. » Biberonné à MTV, le petit Remy s’abreuve aux clips de Nirvana et Metallica. Michael Jackson devient son héros et Dangerous, un disque de chevet. Quand il n’est pas devant la télé, le garçon s’essaie au sport. Mais après un service à la cuillère, deux matchs de foot et un combat de judo, il remise raquette, crampons et kimono pour passer à la guitare. D’abord en plastique, puis électrique, cet instrument lui ouvre les portes de l’informatique. « J’allais souvent sur Internet pour dégoter des tablatures. Puis, j’ai appris à configurer des ordis et à les paramétrer. J’ai toujours eu ce côté un peu geek. »
Remy Lebbos
J’ai toujours eu ce côté un peu geek.
Entre deux captures d’écran, l’ado traîne sa gratte dans un local de répétition. Impliqué dans un groupe de black metal, puis dans un autre influencé par Radiohead, il se distingue ensuite avec Talkshop, formation avec laquelle il remporte le concours Verdur Rock. L’épisode tourne court. Remy Lebbos ouvre alors la parenthèse Ed & June, puis la referme pour rejoindre les Vismets. « En 2010, nous avons sorti Gürü Voodoo, un album qui nous a permis de remplir l’AB, de passer en radio, de jouer en festivals, mais aussi d’accompagner Ghinzu à Forest National. » Le succès est au rendez-vous. Pour peu de temps, cependant... « Je suis tombé gravement malade, explique-t-il. Les médecins étaient pessimistes : ils songeaient à une leucémie ou à un cancer. Finalement, le problème se situait au niveau de la rate. J’ai dû être opéré d’urgence. » Ouvert de long en large, recousu et laissé en convalescence pendant plusieurs mois, le musicien remet son futur en question. « Avec la maladie, j’ai pris conscience que tout pouvait s’arrêter du jour au lendemain. Quand j’étais gamin, je rêvais de devenir ingénieur du son. Au lendemain de l’opération, je me suis donc promis de tenter le coup. » Une fois retapé, Remy Lebbos se lance ainsi dans la construction de son propre studio. « Je l’ai fait avec passion, mais sans aucune formation. C’était quitte ou double. Si je me loupais, tout le milieu serait au courant... » Achevé en 2013, le Rare Sound Studio est désormais un lieu de transit prisé. Nicolas Michaux, Great Mountain Fire, Rive, Antoine Chance, David Numwami ou Paradoxant se sont notamment arrêtés ici pour finaliser l’un ou l’autre album. « J’aime travailler sur des disques aux esthétiques diamétralement opposées, confie le technicien. En tant qu’ingé-son, je m’adapte et j’accompagne les artistes. Je ne prends jamais le contrôle de leurs compos. Mon rôle, c’est de magnifier les morceaux sans les dénaturer ou les aseptiser. » En marge de son travail en studio, Remy Lebbos déballe ses connaissances techniques en cours du soir et poursuit ses activités musicales aux commandes du projet Atome. Tout l’art de mixer différentes activités au cours d’une même journée.