Paradoxant
The Great Escape
Planqué sous un pseudo aux faux airs de produit dopant, Antoine Meersseman s’échappe en solitaire. Loin du peloton et des équipiers de BRNS, le baroudeur trace la route sous le dossard Paradoxant.
«Au printemps 2019, j’ai composé des morceaux en solo, confie Antoine. C’était une année prise de tête. Je me posais beaucoup de questions. Pourquoi faire de la musique ? Pour qui ? Une crise de la trentaine. J’étais lassé des institutions et des logiques de l’industrie musicale. J’ai ressenti le besoin d’aller vers un truc plus subversif, vraiment alternatif. BRNS est souvent présenté comme un groupe indépendant. Nous abordons d’ailleurs notre métier comme un acte militant. Cela dépasse le cadre du divertissement. Pourtant, nous avons basculé là-dedans. Sans rien voir venir… »
Détaché de son escadron, mais au plus près de ses convictions, le musicien aborde ainsi la création de façon artisanale. Bricolées aux côtés d’Antoine Pasqualini (Monolithe Noir) et du batteur Romain Bernard (Ropoporose), les chansons de Paradoxant entraînent la pop du côté obscur de la force. Comme chez Suuns, John Maus ou les Liars, les mélodies se faufilent dans la nuit pour se danser autrement, à l’ombre des faux-semblants et des scintillements.
Désormais, les neuf morceaux enregistrés par le trio s’agitent sous la pochette d’un disque baptisé Earworm. « Un ver d’oreille, ça n’existe pas. Il s’agit d’une allusion à mon état de santé, explique le chanteur. Depuis dix ans, je suis sourd. Côté gauche, je n’entends plus rien. Le clip du single Dead Beat y fait furtivement référence. À un moment, dans la vidéo, on voit un ver de terre se glisser dans mon oreille. Ce lombric est aussi une métaphore un peu farfelue sur la sensualité. Le clip est gentiment érotisant. Sans explication, il s’est même retrouvé sur un site porno. Depuis, il a été retiré. Mais grâce à ça, j’ai pris 3.000 vues en un jour sur YouTube ! En anglais, "earworm" est un terme utilisé pour parler d’une mélodie qui reste en tête, un air dont on ne peut se défaire. »
Pour ça, l’album de Paradoxant fait honneur à son intitulé. Avec ses mélopées magnétiques et quelques ritournelles bien vicieuses, le disque agrippe l’oreille et infiltre les mémoires. Sans contrefaçon.
Paradoxant
Earworm
Humpty Dumpty Records