Jean Louis Marchand
Musiques sans frontières
« Je pleure sur la route, je roule… » comme aurait pu l'écrire Jack Kerouac. C'est un peu également le mood de cet album, disponible via le label SOOND.
Une musique aux confins du contemporain, du jazz, de la poésie: Jean Louis Marchand s’embarrasse peu des frontières. Nomade en studio mobile, il parcourt son pays de naissance, le Centre Est de la France, fin 2021, pour y récolter des sons, des contributions, des inspirations, des réconforts. Il vit aujourd’hui à Bruxelles depuis une collaboration avec Thierry De Mey. « C’est une ville qui m’a blasté. »
Jean Louis Marchand
Je cherchais des choses à faire pour quitter Bruxelles,
mettre tous mes instruments dans une voiture et partir sur la route.
Notre conversation le saisit en pleine vérification du test pressing de son nouvel album : « J’ai carrément produit un double vinyle, un truc énorme qu’on ouvrira, qu’on pourra regarder, avec cette belle photographie de Grégory Dargent ». Mélancolie (surtout), menace (parfois), et ces phases du deuil que sont tristesse (La nuit était déjà tombée), déni (Gorge serrée) ou colère (Les péripéties de la réalité), se diffusent à l’écoute de la vingtaine de morceaux qui retracent un intime et déchirant retour aux origines : « En pleine rupture avec la maman de mes enfants, je cherchais des choses à faire pour quitter Bruxelles, mettre tous mes instruments dans une voiture et partir sur la route, retrouver des gens ». Entre les Vosges, le Morvan ou le Beaujolais, le musicien improvise, capte les sons qu’il croise (la fanfare de Dans la nuit) ou enregistre avec les musiciens qu’il rejoint, musiciens de toutes les générations dont Jacques Di Donato, qui a plus de 80 ans.
Avec son Rhodes et ses clarinettes, Jean Louis Marchand dévoile une sensibilité éraflée et protéiforme. On pense à Hildur Guðnadóttir (Là-bas), avec son violoncelle remplacé par le violon de Ruben Tenenbaum. Jean Louis Marchand aborde la chanson (Suzanne), avec la voix de Jeanne Barbieri. Son jeu au clavier évoque Jozef Demoulin (Les solitudes). Je ne suis pas tombé est un titre pris à une poétesse syrienne : « Quand je l’ai découvert, je me suis dit, waouh, ça, ça me plaît beaucoup. C’était il y a longtemps, mais là, ça a refait sens. ». C’est comme jouer avec le feu, marcher les yeux fermés au bord de la falaise, mais c’est aussi le constat, étourdi, de celui qui se relève dans l’adversité, celui de la vie qui, inlassable, continue.
Jean Louis Marchand
Je ne suis pas tombé
SOOND