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Le magazine de l’actualité musicale en Fédération Wallonie - Bruxelles
par le Conseil de la Musique

Yoann Janssens

Le visage derrière le Culte

DIDIER ZACHARIE

Alors que la pandémie s’éloigne enfin, les sorties d’artistes Culte arrivent en force. Après le premier album de Sky H1 sorti en novembre, les semaines à venir verront des galettes signées par la chanteuse espagnole Clara!, Lawrence Le Doux, Le Motel ou encore Front De Cadeaux.

D’une certaine manière, l’histoire de Culte a commencé sous les ponts. «À 15-16 ans, j’organisais des free parties sous les tunnels des autoroutes», s’amuse aujourd’hui Yoann Janssens. Et puis, il y a eu l’expérience anglaise avec goldFFinch, duo tech-house monté avec son comparse Gilles Renneson en 2011. «On a sorti pas mal de disques sur des labels anglais et on y jouait tous les week-ends. On a vu comment les choses fonctionnaient là-bas. En Angleterre, c’est “marche ou crève”. Nous, on était représentés par l’agence Elastic, mais quand on revenait à Bruxelles, je voyais mes potes qui étaient payés au noir et au lance-pierre. Je me suis dit qu’il y avait un gros problème de professionnalisation. Au sens premier du terme».

Culte Agency est donc lancée en 2015 avec cette idée que l’artiste est un travailleur comme les autres qui a lui aussi le droit d’être assuré et de cotiser pour sa pension. Entre booking, management, promotion, droit des artistes et, aujourd’hui, édition, Culte est une structure multi-tâches qui se présente comme une agence de développement d’artistes électroniques expérimentaux (mais pas que) belges (bis). Lesquels sont d’abord des amis de longue date: Lawrence Le Doux, Front De Cadeaux, Le Motel, Sky H1… Mais à l’époque, tout est encore à faire: «Un agent, c’est quoi? C’est un carnet d’adresses et de la confiance. La confiance, ça prend cinq ans».

 

Yoann Janssens

Au départ, on passait un peu pour des imposteurs, on devait expliquer pourquoi on était là.

 

Les étoiles s’alignent pourtant assez rapidement avec la sortie du premier EP de Sky H1 sur le label berlinois PAN: «Il est directement repéré et ça me permet de me faire un réseau international». Culte est dans la place. «L’idée, c’est d’être à l’écoute des artistes et de répondre à leurs besoins. Avec certains, on parlera beaucoup de l’artistique, avec d’autres ce seront les aspects juridiques. À partir de là, on tire un plan de développement sur six mois et on les accompagne».

Une stratégie de fond qui s’inscrit dans la durée, donc. Et puis, le Covid est passé par là. Paradoxalement, ça a permis à Culte Agency de se professionnaliser un peu plus encore. Avec les aides de la Fédération Wallonie-Bruxelles, l’agence engage deux personnes à mi-temps et se développe. «On a beaucoup bossé l’aspect juridique et lancé une filiale synchronisation (musique à l’image) parce que sans club et sans concerts, c’est la seule source de revenus qui reste aux artistes. On a aussi cherché à trouver d’autres moyens comme des installations sonores dans des centres d’art, par exemple».

Surtout, par rapport à la situation en 2015, Yoann voit «une énorme différence. Au départ, on passait un peu pour des imposteurs, on devait expliquer pourquoi on était là. «Un contrat? Pour quoi faire? On va payer ton DJ au RPI comme on a toujours fait!» Aujourd’hui, c’est entré dans les mœurs. Les promoteurs comprennent la démarche et la soutiennent et les pouvoirs subsidiants voient l’intérêt à mettre beaucoup d’énergie sur des projets qui peuvent paraître non viables d’un point de vue économique. Parce que derrière, il y a un développement sur le long terme. Et quand un artiste rayonne à l’international, même s’il s’agit d’un réseau de niche, ça donne une bonne image pour la ville et le pays».